Mis à jour le 21 septembre 2021
Sous l’impulsion du gouvernement Castex et de la nouvelle politique gouvernementale, les trains de nuit ont fait leur retour.
Malgré le mythe de l’Orient Express véhiculé dans la littérature par Agatha Christie ce mode de transport avait ces dernières décennies perdu de sa superbe.
La loi d’orientation des mobilités, le nouvel intérêt des voyageurs pour l’empreinte carbone de leurs trajets et l’ouverture à la concurrence sur le secteur ferroviaire sont autant d’éléments déclencheurs de ce renouveau.
Les objectifs du gouvernement dans le cadre de la transition écologique sont alors en adéquation avec la relance de ce mode de transport à faible empreinte carbone qui peut représenter une alternative au voyage aérien et à la voiture individuelle.
L’état des lieux aujourd’hui
Le mouvement flight-skam a rallumé la mèche et fait revenir le sujet du train de nuit sur la table.
A l’abandon depuis plusieurs décennies il ne reste plus en France que quelques lignes desservies par des trains de nuit depuis Paris.
Et pourtant ce mode de transport avait connu son essor dans les années 80, il y avait alors en France plus de 550 gares desservies.
Alors que le précédent gouvernement avait délaissé les trains de nuit jugés trop coûteux pour le contribuable, ce mode de transport est revenu au premier plan des projets ferroviaires en 2020.
L’Etat souhaite en effet prendre exemple sur les nombreuses réussites en Europe de l’Est et en Europe du Nord qui ont su remettre au goût du jour ce mode de transport qui tombait en désuétude.
L’exemple de l’Autriche est en effet scruté par ses voisins européens. OBB la compagnie de train autrichienne ayant réussi à redonner de l’attrait au train de nuit en Europe centrale avec ses « Nightjets ».
En Europe du Nord c’est Transdev qui a décidé de lancer une ligne Stockholm – Copenhague – Berlin au deuxième semestre 2021.
L’argument numéro 1 avancé est bien entendu l’impact carbone réduit à portion congrue comparée aux vols aériens low cost opérant sur ces trajets habituellement.
L’abandon en 2016-2017 de la plupart des lignes de train de nuit en France a été une mesure vivement critiquée.
En effet les raisons avancées par l’Etat et la SNCF sont floues, un soi disant désamour du public malgré des taux de remplissage supérieurs à la plupart des TER et Intercités.
Sous le feu des critiques la Direction Intercités avait en effet reconnu que la fréquentation des trains de nuit ne s’était pas dégradée depuis trois ans avec des trains qui étaient même souvent complets.
L’après covid semble avoir depuis quelque mois ravivé la flamme du train de nuit en France.
La ligne Paris-Nice a été relancée au printemps et une ligne Paris-Tarbes-Lourdes devrait ainsi voir le jour d’ici début 2022 même si le ministre Jean-Baptiste Djebbari aurait aimé la voir effective dès cette fin d’année.
Les projets en cours et à venir
Le ministre délégué aux transports justement voit grand à Horizon 2030.
En effet ce nouvel élan donné aux trains de nuit depuis 2019 et le plan d’orientation des mobilités ne semble pas près de s’arrêter.
L’Etat et la SNCF ont donc déjà en tête plusieurs dizaines de lignes à travers la France et au départ de la France pour desservir les grandes villes touristiques de nos voisins européens.
L’objectif est clair et au cœur des enjeux contemporains : favoriser le report modal de l’aérien vers le train de nuit à l’impact carbone bien plus respectueux de l’environnement.
Outre la SNCF et l’Etat qui s’affairent, de nombreux projets pourraient voir le jour dans les prochaines années en France et en Europe.
La levée du monopole accordée à la SNCF avec l’ouverture à la concurrence ouvre en effet la porte à de nombreuses initiatives.
Fort des exemples autrichiens et suédois qui ont réussi à rendre viable économiquement des lignes de train de nuit sans subventions étatiques les idées ne manquent pas.
Prenons deux exemples récents et très différents d’acteurs français qui se positionnent sur de futurs train de nuit.
Railcoop : un projet coopératif
Railcoop est une coopérative ferroviaire qui s’est lancée en 2020 avec pour objectif de redonner vie à certaines lignes abandonnées par la SNCF.
En mars dernier ils ont ainsi franchi une des premières étapes de leur développement après avoir atteint la somme nécessaire pour obtenir la licence voyageur en France.
En effet leur modèle détonne dans le secteur du transport ferroviaire : une coopérative citoyenne où chacun peut prendre part.
L’aventure folle Railcoop ne cesse d’attirer l’œil des médias français dans un pays où la SNCF détient un monopole.
Leur objectif est simple, re-dynamiser des territoires et des gares abandonnées par les dessertes actuelles de la SNCF.
Cela passera par leur première ligne à horizon 2022 qui reliera Bordeaux à Lyon en passant par une douzaine de gares locales.
La SNCF avait abandonné depuis quelques années cette ligne transversale et obligeait les voyageurs à passer par Paris pour effectuer ce trajet ou prendre l’avion.
Railcoop s’inscrit donc pleinement dans les objectifs gouvernementaux du plan d’orientation des mobilités, favoriser le report modal avion/voiture vers le train.
Ils ont ainsi pour projet d’opérer de jour comme de nuit sur cette ligne et ont déjà en tête une dizaine de tronçons transversaux similaires à exploiter en France à l’avenir.
Midnight Trains : L’Europe accesible en une nuit
Le projet de Midnight Trains n’a que peu en commun avec celui de Railcoop. Tout d’abord le projet est une initiative privée menée par deux entrepreneurs français à succès.
Leur objectif avec cette nouvelle compagnie est de proposer uniquement des trains de nuit et faire de ce mode de voyage le moyen de transport le plus confortable et durable possible.
Le but assumé est de proposer une expérience de voyage digne d’un hôtel sur rail pour les voyageurs en recherche d’une alternative à l’avion sur des trajets entre capitales et grandes métropoles européennes.
À la croisée des chemins entre hôtel et moyen de transport l’idée est bien de faire revivre les trains de nuit mythiques comme l’Orient Express en y ajoutant une flexibilité à l’aide du digital.
Le projet en est encore aux prémices mais les fondateurs de Midnight Trains espèrent faire de Paris le point de départ du voyage bas carbone et confortable en train vers des destinations à moins de 1500 km.
Les intérêts à moyen/long terme
Ce regain d’intérêt pour les trains de nuit que ce soit par des opérateurs publics ou privés est en effet au cœur de stratégie globale pour réduire les émissions carbone du transport.
Que ce soit pour l’UE ou la France les émissions de gaz à effet de serre du transport aérien et routier sont colossales.
Selon les estimations, voyager en train permet d’émettre 30 à 50 fois moins de gaz à effet de serre.
La facture pourrait ainsi s’alléger de presque 2 millions de tonnes de CO2 par an d’ici à 2030 d’après les estimations de l’association « Oui au train de nuit ».
Face à la voiture et au covoiturage les initiatives comme celles de Railcoop permettraient ainsi de mieux connecter les territoires français isolés qui ont été snobés par le réseau TGV.
Pour les trajets touristiques en Europe de moins de 1500km les trains de nuit en projet chez la SNCF et Midnight Trains pourraient glaner des parts de marché aux compagnies aériennes.
Une fois de plus les enjeux du report modal sont au cœur des politiques et projets pour limiter l’utilisation de l’avion et de la voiture individuelle au profit du train.
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Nicolas Messager – Business Developper
E-mail : nicolas.messager@tictactrip.eu